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Réfugiés : le long chemin vers l’entrepreneuriat

Monter son entreprise n’est pas une affaire aisée, mais la tâche est d’autant plus ardue lorsqu’on est un réfugié. Entre les diplômes laissés au pays, l’absence d’équivalence entre les qualifications, les problèmes de maîtrise de la langue… Le parcours est véritablement semé d’embûches pour toutes ces personnes qui portent en plus pour la plupart de lourds bagages avec elles.
Mais l’association Touchpoints est là pour les aider, en leur proposant formations et accompagnement. Ils sont déjà plus de 500 réfugiés à avoir franchi le seuil de l’ASBL depuis 2016, année de sa création. Certains pour de simples renseignements, d’autres se sont accrochés et sont parvenus à créer une entreprise dans leur pays d’accueil, le Luxembourg.
C’est après s’être rendue dans différents camps de réfugiés (à Calais, à Thessalonique, sur l‘île de Chios ainsi qu’en Serbie), que Fabienne Colling, jusque-là à la tête d’une agence de communication, a décidé de créer l’ASBL Touchpoints. « Ces différentes expériences m’ont complètement changée et ont totalement transformé ma vie. Elles ont fait éclater ma bulle. Toute cette détresse humaine et cette injustice d’un système très protecteur de lui-même m’ont poussée à faire quelque chose. »

Le graal : un compte bancaire
De retour au Luxembourg, Fabienne Colling refuse donc de rester les bras croisés et veut coûte que coûte aider les réfugiés. Au Grand-Duché, l’aide aux réfugiés s’articule essentiellement autour de deux grandes thématiques : le logement et le travail. Elle choisit la seconde. « Je ne me voyais pas traiter de la question du logement, et puis je me suis rendu compte que rien n’était proposé en termes de micro-entrepreneuriat pour les personnes dans des situations vulnérables. J’ai donc eu un échange très fructueux avec la Chambre de commerce, qui a permis de faire naître le programme de formation pour les futurs entrepreneurs : Sleeves Up. » Grâce à l’appel mateneen (le plus grand appel initié par l’Œuvre nationale de secours Grande-Duchesse-Charlotte, qui a soutenu plus de 120 projets venant en aide aux réfugiés), Fabienne Colling fonde alors son ASBL, Touchpoints.
Lorsqu’un réfugié leur fait part de son projet, les collaborateurs de l’association, au nombre de quatre, procèdent en premier lieu à « une évaluation individuelle » : « Nous voulons comprendre dans quelle situation il se trouve. C’est très important pour nous de savoir quel impact la création d’entreprise peut avoir sur la situation familiale, financière, psychologique aussi. »


Obtenir un compte bancaire professionnel reste l’une des difficultés majeures rencontrée par les réfugiés, explique la fondatrice de Touchpoints, Fabienne Colling.

Les plus motivés peuvent ensuite suivre une formation d’une semaine qui leur présente les différentes étapes administratives auxquelles ils devront se soumettre. S’ensuivra l’élaboration d’un business plan (« simplifié et didactique »), et d’un accompagnement individuel d’une quarantaine d’heures étalées sur plusieurs mois.
Car le processus est long avant d’aboutir : environ un an et demi en moyenne. Et le parcours, parsemé d’obstacles. Si la fondatrice de Touchpoints constate une amélioration concernant l’octroi du permis de travail, l’ouverture d’un compte bancaire professionnel et l‘obtention d’un prêt restent des difficultés majeures pour les réfugiés. « Obtenir un prêt pour lancer son entreprise est difficile pour tout le monde, mais c’est impossible pour les réfugiés. Aucun réfugié n’obtient un prêt d’une banque traditionnelle au Luxembourg, sauf s’il réussit à avoir un investisseur possédant de l’immobilier par exemple. » Microlux est en effet la seule institution du pays à octroyer des microcrédits aux entrepreneurs qui n’ont pas accès au crédit bancaire traditionnel.
En outre, si le droit européen oblige les banques à fournir un compte bancaire à tous les résidents – « généralement c’est la Post qui s’en charge ici », rappelle Fabienne Colling –, rien ne les oblige par contre à permettre l’ouverture d’un deuxième compte. « Cela n’empêche pas d’ouvrir son entreprise, mais cela complique beaucoup les choses. Nous avons par exemple un bénéficiaire qui gagne 30 000 euros cash tous les mois avec son épicerie, mais qui ne possède pas de compte pour les déposer! C’est loin d’être anecdotique! »
En attendant que la situation évolue, l’ASBL et ses bénéficiaires doivent tenter de parer à cette problématique. « Rien n’oblige les banques à entrer en relation, mais nous essayons de discuter, de fournir des documents et de communiquer positivement. Nous informons aussi les réfugiés d’entrer très tôt en relation avec une autre banque que la Post pour qu’elle apprenne à les connaître. Lorsque le Luxembourg verrouille ses lois sur le blanchiment pour faire figure de bon élève, c’est à la base que ça se resserre et ce sont les petits qui trinquent, réfugiés ou étrangers. »

L’artisanat, secteur fermé
Entre le labyrinthe administratif et le manque de moyens financiers, nombreux sont ceux qui finissent par abandonner leur rêve. Parfois même, celui-ci s’avère quasiment inaccessible du seul fait qu’il relève de l’artisanat. Secteur très protégé au Luxembourg, l’artisanat demeure en effet difficile d’accès pour les réfugiés, même si Touchpoints peut se féliciter de quelques victoires, à l’instar de celle de Hassan Almamuri qui, après un long processus, est parvenu à ouvrir son salon de coiffure pour hommes, le Prince coiffure, à Bonnevoie.
« De plus en plus de personnes peuvent démarrer une activité dans l’artisanat, notamment dans la coiffure», se réjouit Fabienne Colling, qui explique : «C’est un secteur très fermé car il faut disposer d’une maîtrise reconnue et justifier d’une expérience. Mais les réfugiés qui ont dû quitter leur pays du jour au lendemain n’ont pas leurs diplômes avec eux ou pas de preuves formalisées comme ici. Les autorisations dépendent donc parfois de notre créativité et du bon-vouloir des administrations. »
La plupart des bénéficiaires de Touchpoints sont des hommes. « Il y a 30 % de femmes dans les formations, et 10 à 20 % d’entre elles créent une activité, souvent dans le secteur associatif, autour de l’interculturalité », indique la fondatrice. Une sous-représentation qui s’e xplique par la faible représentation des femmes parmi les réfugiés d’une part (les réfugiés sont majoritairement des hommes sur le territoire luxembourgeois), mais aussi sans doute parce qu’elles s’occupent de la vie familiale.
La majorité de ces potentiels créateurs d’entreprises (60%) ont entre 30 et 44 ans. Ils viennent pour la plupart du Proche et du Moyen-Orient: Syrie, Irak, Afghanistan, Iran… Plus occasionnellement d’Amérique latine ou de certains pays africains. « Ils ont généralement quitté une vie déjà bien construite dans leur pays d’origine. Et comme ils ne se retrouvent pas sur le marché du travail luxembourgeois, étaient déjà entrepreneurs ou jouissaient d’un statut social élevé dans le passé, ils préfèrent se tourner vers l’entrepreneuriat », explique Fabienne Colling. « Ici, ils se retrouvent au bas de l’échelle, sans réelles perspectives d‘évolution, sans réseau, sans les bonnes qualifications, sans les langues. Dans l’entrepreneuriat, ils ont l’impression d’être plus en contrôle et d’avoir plus de potentiel au niveau financier. »
Commerces, restauration, services à la personne tels que du jardinage ou du nettoyage : ils sont une soixantaine de réfugiés passés par Touchpoints à être actuellement à la tête d’une entreprise.

Luxemburger Plaudertaschen gesucht 

SPRACHAUSTAUSCH ASTI startet Aufruf für neues Projekt

Eric Hamus, tageblatt 26. Februar 2021
Sie sprechen ­Luxemburgisch, plaudern gerne und finden ­Gefallen daran, Kontakte zu knüpfen und neue Kulturen kennenzulernen? Sie fühlen sich wegen Covid zunehmend isoliert und brauchen dringend etwas Abwechslung? Dann ist das neue Sprachprojekt der „Association de soutien aux travailleurs ­immigrés“ (ASTI) genau das Richtige für Sie!
„Die beste Methode, um eine Sprache zu lernen, ist, sie, wirklich zu sprechen“, unterstreicht Laura Zuccoli, die Vorsitzende der Ausländerorganisation. Sprache vereinfache nicht nur die Integration, sondern biete auch eine gute Gelegenheit, Menschen miteinander in Verbindung zu bringen. Regelmäßig fördert die ASTI entsprechende Projekte, die es Migranten erlauben, über das Erlernen einer neuen Sprache Fuß im Großherzogtum zu fassen.
Das neueste Projekt aber richtet sich nicht nur an Migranten: Vielmehr werden damit auch Einheimische angesprochen, die entweder ihre Sprache vermitteln und zugezogenen Menschen das Land näher bringen oder sich selber im Umgang mit fremden Sprachen verbessern wollen. Im Gegenzug winken interessante Einsichten in andere Kulturen und möglicherweise auch Freundschaften, die ansonsten nie zustande gekommen wären.
Das neueste Projekt der ASTI zielt deshalb darauf ab, Menschen nach dem Vorbild sogenannter Sprachcafés zusammenzuführen. Gemeint damit sind lockere Treffen von Menschen, die gerne offen und unkompliziert Sprachen üben und andere Kulturen kennenlernen. Leider seien physische Treffen in Zeiten einer sanitären Krise nur schwer möglich, so Zuccoli. Deshalb habe man den Austausch ins Netz verlagert: „Wegen Covid kam uns die Idee, aufs Handy oder andere moderne Kommunikationsmittel zurückzugreifen“, sagt Zuccoli. Schließlich gebe es inzwischen gute Videochat-Programme, die auch diesen Austausch vereinfachen.

90 neue Sprachpaare

Konkret führt die Ausländerorganisation Menschen, die ihre Sprachkenntnisse verbessern wollen, mit Personen zusammen, die sich freiwillig bereitstellen, die eigene Sprache(n) mit Lernwilligen zu üben. „Die eine Person beherrscht Luxemburgisch, Französisch, Deutsch oder Englisch und die andere Person ist glücklich, die Sprache praktizieren zu dürfen“, fasst die ASTI-Vorsitzende das Konzept zusammen. Über ausgedehnte pädagogische Fähigkeiten bräuchten die sogenannten „Coaches“ nicht zu verfügen. „Es genügt, dass die Menschen die Sprache gut beherrschen“, so Zuccoli. Tatsächlich sollen bei den Treffen auch weniger pädagogische Sprachkenntnisse vermittelt, als vielmehr einfach nur über Gott und die Welt geplaudert werden.
Wer dennoch etwas Starthilfe benötigt, kann an einer kostenlosen zweistündigen Ausbildung teilnehmen. Dabei werden unter anderem grundlegende Kenntnisse der Sprachpraxis sowie mögliche Gesprächsthemen und Ratschläge zur Arbeit mit Menschen aus anderen Kulturkreisen vermittelt. „Auch ist beim ersten Gespräch immer einer von uns mit in der Leitung, um die Kontaktaufnahme zu vereinfachen und bei möglichen Fragen Rede und Antwort zu stehen“, erklärt Zuccoli.
Mehr als 200 Menschen haben seit November Interesse am Projekt angemeldet. Vier Kurse wurden abgehalten, mit jeweils mehr als 20 Teilnehmern. 90 „Sprachpaare“ seien auf diesem Weg bereits zustande gekommen. Mit außerordentlichem Erfolg: „Es gab nur drei Fälle, bei denen es nicht geklappt hat“, verrät die ASTI-Präsidentin. „Und das auch nur, weil das Sprachniveau einfach zu niedrig war. Ein gewisses Minimum ist Voraussetzung, damit man sich verständigen kann.“
Angeboten werden die vier Hauptsprachen des Landes: Luxemburgisch, Deutsch, Französisch und Englisch. „Das Projekt dürfte demnach auch für Luxemburger interessant sein. Für junge Menschen etwa, die ihr Französisch oder Englisch verbessern möchten“, sagt Zuccoli. Nicht selten seien Lernwillige auch bereit, die eigene Sprache als Coaches mit anderen Betroffenen zu üben. „Franzosen etwa, die ihren Umgang mit der englischen Sprache verbessern möchten und im Gegenzug mit anderen Betroffenen Französisch sprechen“, erklärt die ASTI-Vorsitzende.
Die Teilnehmer sind so vielfältig wie die Bevölkerung Luxemburgs. Von jung bis alt, von Studenten über Bankangestellte, Arbeiter oder Manager bis hin zu Ruheständlern seien sämtliche sozialen Schichten vertreten. „Schön ist, dass die Menschen, die über diesen Weg zusammenfinden, nicht nur Sprachen üben, sondern auch ihren Horizont erweitern können“, freut sich Zuccoli. „Teilnehmer lernen neue Menschen und Kulturen kennen, sie entdecken Luxemburg oder erhalten die Möglichkeit, anderen Personen das Land näherzubringen. Die Möglichkeiten sind grenzenlos-“
Ob per Telefon, Tablet, Laptop oder PC – das überlasse man den Pärchen. Flexibilität wird nämlich großgeschrieben. „Treffen“ sollen sich die Übungspaare, wenn es ihnen am besten passt. Sollte mal etwas dazwischen kommen, lässt sich die Plauderstunde auch leicht verschieben. Vorgeschlagen wird eine Kontaktaufnahme die Woche, optimal seien 45 Minuten. „Dabei kann man über alle möglichen Themen reden. Und wenn man keine Lust mehr hat, hört man einfach auf“, erklärt Zuccoli.
Natürlich empfehle man den Teilnehmern, aus Sicherheitsgründen zunächst nur über die Kommunikationsmittel miteinander zu plaudern. Ansonsten aber gelten keine Vorschriften: „Wer später mehr daraus machen möchte, kann das gerne tun“, sagt Zuccoli. In anderen Worten: „Wenn das Wetter wieder besser wird, kann man sich gerne auch mal im Freien treffen. Das ist den Teilnehmern natürlich freigestellt.“

Freundschaften 
ausdrücklich erwünscht

Positiv ist auch der Umstand, dass das Projekt nichts kostet. Die ASTI setzt auf die Unterstützung Freiwilliger, die sich gerne mit anderen Menschen austauschen. So trage jeder für sich einen Gewinn davon. Außerdem fördere dieses Prinzip die Freundschaften, so Zuccoli: „Lernwillige sind dankbar, dass Coaches sich Zeit für sie nehmen. Und Coaches freuen sich über den Austausch. So entsteht eine menschliche Verbindung, die bei Zahlung eines Beitrages vielleicht nicht entstanden wäre.“ Auf diesem Weg könnten richtige Freundschaften entstehen.
Der bisherige Erfolg des Projektes gibt den Initiatoren recht. Mit mehr als 200 Teilnehmern in drei Monaten kann sich die Vereinigung nicht über fehlendes Interesse beklagen. Einen Haken gibt es dennoch: Es fehlen Luxemburger Plaudertaschen. In allen anderen Sprachen verfüge man über ausreichend Coaches. „Wir haben viele Interessenten, die Luxemburgisch üben wollen, doch nur wenig Personen, die Luxemburgisch sprechen“, bedauert Zuccoli. Avis aux amateurs, also!
So hoffen die Organisatoren auf Interessenten, die bereit wären, mit anderen Lernwilligen Luxemburgisch zu üben. „Das Projekt könnte vor allem ältere Menschen ansprechen. Für sie ist es eine gute Gelegenheit, während der Pandemie aus ihrer Isolation auszubrechen und mit Menschen Kontakt zu haben, die nicht unbedingt zum engeren Familienkreis zählen.“ Über Telefon bestehe auch kein Risiko, sich mit Covid-19 anzustecken. „Man muss nur Lust haben, mit Menschen zu plaudern, und die Kommunikationsmittel bedienen können“, sagt die Präsidentin der ASTI. „Darüber hinaus ist es ein schönes, vielversprechendes Projekt. Die Teilnehmer sind äußerst motiviert, das Echo ist durchwegs positiv. Wir würden uns auf jeden Fall noch über weitere Zusagen freuen.“
Leser, die Interesse daran haben, Luxemburgisch mit Personen zu sprechen, die die Sprache erlernen wollen, können sich ohne Weiteres bei der ASTI ­melden (Tel.: 43 83 33-1). Mehr Informationen finden Sie auf www.asti.lu.
Die beste ­Methode, um eine Sprache zu lernen, ist, sie ­wirklich zu sprechen
Laura Zuccoli
Theorie ist gut, Praxis ist besser: Luxemburgisch lernt man am besten im alltäglichen Gebrauch.
Genau daran fehlt es vielen Lernwilligen.
Mehr als 200 Teilnehmer haben seit November Interesse am Projekt angemeldet

38 e Festival ….. online

Le 38e Festival des Migrations des Cultures et de la Citoyenneté, pandémie oblige passe online

De nombreuses conférences aborderont les sujets suivants:

  • le logement
  • l’intégration et les discriminations
  • les répercussions psychologiques de la crise sanitaire,
  • la réforme de la législations sur les asbl

Le programme complet et l’inscription pour les conférences sur le site du CLAE 

Les conférences seront retransmises sur le canal Youtube du CLAE.

Idem pour les discours officiels

Le volet musical se passera sur es ondes de Radio Latina

Transition days

Le Centre for Ecological Learning Luxembourg et l’ASTI, avec la participation du CNE -Conseil National pour Étrangers  invitent à un forum virtuel « Les tiers-lieux au Luxembourg : faire ensemble pour mieux vivre ensemble ». Le but est de discuter de la nécessité d’enrichir la vie en communauté par le biais de ce qu’on appelle les « tiers-lieux ».

L’avenir se base sur une responsabilité partagée, nous avons donc besoin de lieux inspirants pour envisager des solutions aux défis sociétaux qui se posent. Imaginez des citoyens en contact par des réseaux sociaux ‘live’ ! La force d’un tiers-lieu -aussi attrayant que possible – est de devenir l’âme visible, le phare de l’engagement durable au niveau local.

Trois rendez – vous:

Mardi, 23.02.21 | 12h15 en ligne : qu’est un tiers-lieu et en quoi c’est intéressant. Seront présentés des exemples en Europe et au Luxembourg, le tout suivi d’une séance de discussion avec le public pour réfléchir ensemble à la mise en place de tels lieux au grand-duché.

S’enregistrer ici 

Mercredi 24.02.21 14h30 | en ligne.  Le tiers-lieu, un instrument pour responsabiliser et mobiliser les citoyens

S’enregistrer ici 

Jeudi 25.02.21 I 19.00 I en ligne . Comment mettre en place un tiers lieu avec mes voisins,

S’inscrire ici

François Gemenne : on a tous un ami noir (Fayard 2020)

Raymond Weber, note de lecture  Brennpunkt 3. Welt

– La « crise » des réfugiés » et le « problème » des migrations continuent, même en ce début d’année 2021, où la crise du coronavirus reste omniprésente dans la presse, à occuper la Une des journaux : morts en Méditerranée, conditions de vie scandaleuses dans les camps en Grèce (Moria) ou en Bosnie-Herzégovine (Lipa), destruction de campements à Paris et à Calais. Nous nous trouvons ici devant un « shutdown de l’humanité en Europe » (Heribert Prantl dans la Süddeutsche Zeitung) : c’est une situation indigne d’une Europe, Prix Nobel de la Paix 2012 et d’une Communauté/Union qui se veut garante de « valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, d’état de droit, ainsi que de respect des droits de l’homme », comme le précise l’article 2 des Traités de l’Union Européenne.

«On manque de modèles»

Nous sommes au XXI siècle et pourtant l’égalité salariale, les postes de direction et l’entrepreneuriat, faute d’un manque d’accès au capital, restent encore difficilement accessibles aux femmes. D’autant plus lorsque celles-ci ne sont pas blanches. «Dans le monde entier, après des décennies de militantisme et des dizaines de lois sur l’égalité de rémunération, les femmes n’ont toujours droit qu’à 80 centimes pour chaque dollar gagné par les hommes. Ce chiffre est encore plus bas pour les femmes avec enfants, les femmes racisées, les réfugiées et les migrantes ou les femmes en situation de handicap. (…) D’après l’analyse du Forum économique mondial, il faudrait 257 ans pour combler cet écart», avait rappelé le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, dans son message passé à l’occasion de la journée internationale de l’Égalité de rémunération, le 18 septembre dernier.


Elles étaient nombreuses (dans la limite imposée par les restrictions sanitaires) à être venues entendre les précieux conseils de ces femmes qui ont réussi à s’imposer.

Afin d’aider ces femmes à reprendre leur pouvoir et à oser mettre en œuvre leur projet entrepreneurial, l’association féministe et antiraciste Lëtz Rise Up a donc décidé de lancer le «Peanut Project», une série de conférences destinée à permettre aux femmes racisées d’échanger avec des entrepreneuses à succès issues des minorités ethniques et raciales.
Après une première session sur le thème «Confiance et leadership au féminin» en novembre dernier, une deuxième s’est tenue samedi à la Chambre de commerce de Luxembourg, cette fois-ci sur le thème «Femmes, pouvoir et argent». Au programme, des retours d’expérience d’intervenantes de marque : la femme d’affaires maroco-britannique Najwa El Iraki, fondatrice de AfricaDev Consulting et représentante pour l’Afrique du Nord et de l’Ouest du marché d’assurance Lloyd’s of London; Ahoua Eve Bakayoko, la créatrice de Miss Bak, marque de soins corporels naturels et éthique; et l’entrepreneuse, animatrice et chroniqueuse de télévision Hapsatou Sy.

Manque de confiance en soi

La difficulté pour les femmes à s’imposer dans un monde encore largement dominé par les hommes qui ne les prennent pas au sérieux ne vient pas de nulle part, comme le résume Najwa El Iraki : « Toutes les femmes ont été au moins une fois critiquées vis-à-vis de leurs émotions ou de leurs sentiments, et se sont entendues dire qu’elles “sur-réagissaient” ou étaient trop “sensibles”. Par exemple, lorsque la directrice de la gestion des risques chez Lehman Brothers a prévenu du risque d’effondrement de l’économie mondiale, elle s’est vu répondre qu’elle réagissait de façon excessive… » À quoi s’ajoutent le manque d’éducation financière (il y a quelques décennies encore, les femmes devaient obtenir l’accord de leur mari pour ouvrir un compte bancaire) et l’absence de modèles de réussite féminins et racisés. « Les hommes ne sont pas l’ennemi, mais le problème c’est le système les maintenant dans cette domination et nous excluant. Les femmes avec de l’argent et les femmes de pouvoir sont deux idées inconfortables dans notre société », ajoute la femme d’affaires, citant la romancière Candace Bushnell.
« Les femmes doivent être indépendantes financièrement », a renchéri Hapsatou Sy, mère de deux enfants et dont l’entreprise de distribution à domicile de sa marque de cosmétiques regroupe plus de 1 000 «beautypreneuses» et atteint plusieurs millions de chiffre d’affaires. « Mais je ne crois pas au déterminisme social, à l’entrepreneuriat des minorités ethniques ou des femmes. J’achète des produits s’ils sont bons, pas parce qu’ils ont été faits par une Noire. »
C’est dans son histoire familiale qu’Hapsatou Sy a puisé sa force de caractère, malgré les échecs qu’elle a pu rencontrer. « Je me suis battue pour faire honneur à mon père, immigrant sénégalais qui a décidé de tout quitter et a littéralement risqué sa vie pour offrir à ses huit enfants un meilleur avenir. Quant à mère, elle s’est mariée à 13 ans et ne savait pas écrire. Mais elle n’a jamais demandé d’argent à mon père. Je ne me voyais pas leur dire “C’est trop dur, je suis une femme et je suis noire”. En plus, ce que je suis, ce qu’ils m’ont donné, n’a pas à être un problème. »
Des propos inspirants qui ont rencontré un vif écho dans l’assistance. Mêmesil’entrepreneuriatn’estpasun long fleuve tranquille, toutes ont ressentiunregaindemotivation.L’admiration était palpable. Elles étaient en effetnombreuses(danslalimiteimposéeparlesrestrictionssanitaires)àêtre venues entendre les précieux conseils de ces femmes qui ont réussi à s’imposer. À l’instar d’Alice, qui travaille actuellement au sein de Médecins du monde mais espère aussi pouvoir créersapropremarquedeprêt-à-porter éthique. « Je suis venue pour avoir des astucespourdevenirentrepreneuseet parce que j’avais besoin d’exemples. On manque de modèles. J’ai un peu peur de me lancer en plus. Je sais d’expérience et pour l’avoir beaucoup constaté autour de moi qu’on neportepasforcémentattentionàce que l’on fait ou à ce qu’on veut réaliserentantquefemmeracisée.J’espère aussi étoffer mes contacts. »
« La confiance en soi, c’est la clé », a martelé Ahoua Eve Bakayoko. « La plupart des gens vont vous sous-estimer. Il faut donc s’instruire pour maîtriser son sujet, prendre du temps pour soi également afin d’être dans un bon état d’esprit, et ensuite, s’imposer par sa seule présence. Si vous ne croyez pas en vous, qui va le faire? »
La prochaine master class du «Peanut Project» se tiendra le 8 mai 2021 et aura pour thème «Conciliation entrepreneuriat-famille». Les entrepreneuses Imane Belmkaddem, Myriam Taylor et Jennifer He Olding viendront partager leur expérience et dispenser de précieux conseils.

Des bons alimentaires pour les sans-papiers

Si Irène Jamsek, la coordinatrice des épiceries sociales de Caritas, confirme que les Caritas Buttek ont vu le nombre de leurs bénéficiaires augmenter en 2020 par rapport à 2019, elle ne s’aventure pas pour autant à dire que les pauvres sont forcément plus nombreux du fait des conséquences de la crise sanitaire.
Trois raisons expliqueraient en fait cette augmentation d’après la responsable Caritas. Tout d’abord, plusieurs nouveaux bénéficiaires ont été orientés vers les épiceries sociales via la Corona Helpline, mise en place d’avril à août, « des personnes qui n’avaient peutêtre pas entendu parler de cette aide avant la pandémie », souligne Irène Jamsek. La fermeture des épiceries de la Croix-Rouge a également contribué à la redirection vers celles de la Caritas d’un grand nombre de bénéficiaires. Enfin, avant le Covid, « seules les personnes résidentes et ayant un matricule luxembourgeois avaient accès aux épiceries sociales », rappelle la coordinatrice, mais, à la demande de l’Association de soutien aux travailleurs immigrés (ASTI), l’accès a aussi été autorisé aux travailleurs vivant dans le pays sans autorisation de séjour.
Cette initiative a été lancée dès le mois d’avril par l’ASTI, face à la fermeture notamment des restaurants et cafés où travaillent souvent au noir des personnes en situation irrégulière, comme le rappelle Sergio Ferreira, le porte-parole de l’ASTI : « Ces personnes n’ont pas droit au chômage et n’avaient donc plus aucune source de revenu. Comme nous n’avons pas eu gain de cause auprès des autorités luxembourgeoises pour les aider, nous avons contacté Caritas et la Croix-Rouge pour leur permettre d’accéder aux épiceries sociales par le biais de bons alimentaires remis par l’ASTI. Nous avons donc lancé un appel aux dons destiné à financer ces bons, qui étaient indispensables, puisque ces personnes, n’ayant plus de revenus, ne pouvaient pas effectuer des achats même dans une épicerie sociale. »
Un appel qui sera entendu: grâce aux dons et au soutien financier de l’Œuvre Grande-Duchesse Charlotte, l’ASTI a pu distribuer l’équivalent de 36 000 euros entre le 10 avril et le 17 juillet. L’opération, réitérée du 6 octobre au 15 décembre, a permis de distribuer à nouveau pour 21 300 euros de bons alimentaires à 90 personnes, représentant 35 ménages et 35 enfants.

Régularisation exceptionnelle
Sergio Ferreira attire toutefois l’attention sur le fait que le besoin est toujours présent. « Il y a toujours des gens qui s’adressent à nous. Nous allons faire notre possible pour les aider. Nous avons lancé des appels aux dons auprès des entreprises, mais sans grand succès jusqu’à présent. Le fait que ce sont des sans-papiers fait peur. Mais derrière ce terme, il y a des gens, des familles, des drames. »
Mais dans le fond, plus qu’une prolongation de l’accès aux épiceries sociales et à l’aide alimentaire, l’ASTI souhaiterait une régularisation exceptionnelle de ces sans-papiers. « Ils pourraient être régularisés sans que cela représente une charge déraisonnable. Au contraire, ils pourraient devenir des contribuables. D’ailleurs, beaucoup d’entre eux cotisent déjà pour l’assurance maladie volontaire. »
Quant au fait que ces aides et une régularisation puissent créer un «appel d’air», comme l’affirment les opposants, Sergio Ferreira balaie d’un revers de la main cet argument : « L’appel d’air est un mythe. Les précédentes régularisations n’ont pas créé une ruée. Il faut que l’Europe développe des voies légales d’immigration pour éviter les passeurs et la précarité. Mais surtout, nos législations, notre ouverture ou notre fermeture face à l’immigration, ont un impact extrêmement ténu sur les flux migratoires. Car ce qui est déterminant, ce ne sont pas les conditions d’accueil, mais la situation dans le pays d’origine. »
T. S.

Bien manger, même quand on n’a rien

Lundi 14 h 30, à l’angle de la rue Michel-Welter à Luxembourg. Plusieurs personnes attendent patiemment, masque sur le nez et sacs de course au pied, devant l’épicerie sociale de Caritas. Celle-ci a ouvert ses portes il y a une demi-heure à peine, mais les bénéficiaires se succèdent déjà dans un ballet incessant pour accéder au plus grand choix de produits. Premier arrivé, premier servi.
Ici, on retrouve quelque 300 produits de base, vendus trois fois moins cher en moyenne que dans les grandes surfaces. Sur les étagères en bois qui courent le long du mur une fois le seuil de l’épicerie franchi, on retrouve les denrées non périssables et les conserves, telles que les paquets de pâtes, le sucre ou l’huile. C’est le stock le plus important de l’épicerie, les étagères dont il faut s’assurer qu’elles ne sont jamais vides, afin d’« être sûr que les bénéficiaires ne manquent pas d’aliments de base, car on ne peut pas être approvisionné dès que les rayons se vident comme dans les grands magasins », explique Irène Jamsek, la coordinatrice des Caritas Buttek. Et puis, des rayons pleins donnent moins le sentiment d’être dans une épicerie sociale. « C’est une forme de respect vis-à-vis des bénéficiaires. Tout comme le fait de ne pas leur fournir des tomates abîmées ou des carottes flétries. »
Fruits et légumes frais trônent d’ailleurs au centre de la petite échoppe, déjà disposés dans des sacs en papier, crise sanitaire oblige. Aubergines à 1,17 euro le kilo, 0,42 centime le kilo de bananes… Bien manger à un prix accessible reste le credo des épiceries sociales.
Sur d’autres rayons, il y a des invendus de la veille de la boulangerie Fischer, un peu de pain, quelques viennoiseries. De temps en temps, on peut y trouver des produits un peu plus «exceptionnels» pour l’épicerie. Aujourd’hui, ce sont des paquets de chips et de petits gâteaux. Au fond du magasin, les produits d’hygiène et d’entretien de la maison. Dans les frigos, les produits frais bien sûr, mais surtout des aliments à date de consommation courte comme des viandes, des poissons, quelques plats traiteurs. Ces articles sont vendus entre 20 centimes et un euro. Une aubaine pour des personnes qui n’ont pas accès à ces produits plus luxueux mais aussi une manière de lutter contre le gaspillage alimentaire. Les amateurs pourront ainsi prendre des noix de SaintJacques à consommer ce jour. Elles seront vendues un euro au lieu des 8,85 euros affichés sur la barquette.


Défi relevé pour Irène Jamsek, coordinatrice des épiceries sociales Caritas, et ses équipes : les Caritas Buttek ont su rester ouvertes depuis le début de la crise sanitaire.

Juste à côté des frigos, des étagères mettent en avant les produits entièrement gratuits du moment : du lait, quelques gels douche, du papier-toilette. Et aussi des masques, si indispensables en ces temps de pandémie. « Une fois par mois, nous proposons des articles gratuits financés par le Fonds européen d’aide aux plus démunis (FEAD). Ils peuvent être pris en plus des 25 euros hebdomadaires alloués aux bénéficiaires. »

Vingt-cinq euros par semaine
Une assistante sociale analyse la situationfinancièredeséventuelsbénéficiaires. « Elle va regarder le montant qui rentre et tout l’argent qui sort. Si au final une personne seule dispose de moins de 400 euros, celle-ci pourra avoir accès à l’épicerie sociale », explique Irène Jamsek. Elle se verra alors accorder une carte d’accès d’une validité de trois mois maximum, renouvelable si nécessaire.
Le montant alloué est le même pour tout le monde: 25 euros par personne et par semaine. Cela peut paraître peu, mais en fait, « ces 25 euros équivalent à 75 euros dans une grande surface du fait du prix moins cher des produits », indique Irène Jamsek. Une réduction rendue possible grâce au travail de la «Spëndchen», la centrale d’achat des épiceries sociales de Caritas (ainsi que celles de la Croix-Rouge), qui a la charge de négocier les prix au plus bas avec les fournisseurs.
Au passage en caisse, deux possibilités pour les bénéficiaires : soit ils payent en espèces, soit, pour ceux qui n’ont absolument plus de moyens, le montant est enregistré et sera refacturé aux services sociaux, toujours à hauteur de 25 euros hebdomadaires. « On encourage les personnes à venir chaque semaine , précise Irène Jamsek. Si une famille de cinq personnes décide de venir une fois avec l’équivalent de trois semaines de bons, nous n’aurons plus de marchandise pour les autres! »
Voilà plus de dix ans maintenant que les Caritas Buttek viennent en aide aux plus défavorisés. Elles sont quatre dans le pays, Luxembourg donc, mais aussi Esch, Diekirch et Redange. À l’image de la capitale, le multiculturalisme est très visible ici. Ce qui a poussé Caritas à adapter un peu les produits. « On ne peut pas faire du cas par cas bien sûr, mais on essaie d’avoir plus de poulet et de fruits et légumes par exemple. »
Seul fait établi dans ce public très diversifié qui se rend à l’épicerie sociale : en général, les personnes âgées sont bénéficiaires sur le long terme, ce qui est moins le cas pour les plus jeunes, comme l’explique Irène Jamsek: « On peut supposer que la situation d’un individu plus jeune pourra évoluer, soit parce qu’il trouve du travail ou un travail mieux rémunéré, soit parce qu’il trouve un conjoint
Derrière l’image d’un pays riche, il y a donc beaucoup de gens qui peinent à s’en sortir. « Ce n’est pas évident pour les familles monoparentales par exemple. Beaucoup de nos bénéficiaires travaillent, mais n’arrivent pas à joindre les deux bouts, notamment à cause des loyers. » C’est le cas de Nilzete, une Brésilienne qui vit depuis treize ans au Luxembourg. Cette maman solo de 39 ans travaille, mais ne gagne pas assez pour couvrir ses besoins et ceux de sa fille de trois ans. « Le loyer est cher! Venir ici me soulage énormément, surtout pour les couches. »
Rachel, elle, a 52 ans. La vie n’a pas épargné cette Luxembourgeoise mère de trois enfants aujourd’hui adultes, divorcée de son conjoint. « Je viens ici depuis que j’ai le RMG. Je travaillais dans le nettoyage, mais il y a cinq ans, j’ai fait une dépression nerveuse et comme j’étais en période d’essai, j’ai été licenciée. J’ai touché le chômage, puis pendant un an et demi, j’ai vécu sans rien, quasiment comme une SDF. » Depuis qu’elle a eu accès à l’épicerie, Rachel vient toutes les semaines se fournir en aliments de base, mais aussi trouver un peu de chaleur humaine « Déjà, ça m’aide beaucoup, mais en plus j’adore venir ici, car les bénévoles sont super sympas, on discute toujours un peu », ajoute-t-elle, les yeux qui brillent.
Plus qu’une simple épicerie, c’est aussi en effet un moment de réconfort. Même si la pandémie est venue y mettre son grain de sel: « Avant, nous avions un café Stuff, c’était vraiment l’occasion pour les personnes isolées de trouver de la compagnie. On organisait aussi des ateliers parents-enfants, couture, informatique, cuisine… Nous avons dû tout mettre en suspens» , déplore la coordinatrice.
La pandémie a aussi eu un impact sur les ressources humaines, puisque les épiceries étaient tenues par des bénévoles dont beaucoup étaient âgés ou à risque, et qui se sont donc écartés le temps de la crise. Mais Caritas a malgré tout réussi à rester ouvert, en ayant notamment recours au personnel sous contrat ou sous convention, pour le plus grand soulagement d’Irène Jamsek. « C’est une fierté d’avoir pu rester tout le temps ouvert, on touche du bois pour que ça continue! »