La Gauche écœurée par le pacte migratoire
Le Quotidien 12 avril 2924
Déi Lénk constate amèrement que les frontières extérieures
de l’Union européenne seront hermétiquement fermées.
Déi Lénk ne partage absolument pas la satisfaction générale suscitée par le vote du pacte migratoire, mercredi au Parlement européen. Le parti n’y voit que cynisme et mépris.
C’était jour de fête au Parlement européen, mercredi, jour du vote, qualifié volontiers d’historique, du pacte sur la migration et l’asile. Après dix ans de travaux, un consensus avait enfin été trouvé en décembre dernier entre les Vingt-Sept. Pendant que la présidente de l’institution européenne se réjouissait d’avoir participé à l’écriture d’une «page d’histoire», se félicitant de «l’équilibre entre solidarité et responsabilité» que propose le nouveau pacte, les partis de gauche et les Verts exprimaient leur profonde tristesse. Parmi les Luxembourgeois, seule l’eurodéputée Tilly Metz (déi gréng) a voté contre le paquet migratoire.
Pour déi Lénk, ce texte transpire «le cynisme» et «le mépris», de manière «inimaginable». Le parti constate amèrement que les frontières extérieures seront hermétiquement fermées, «de sorte que les personnes fuyant la guerre, la misère et la répression ne peuvent plus du tout se réfugier dans l’UE».
La réforme introduit, effectivement, un filtrage obligatoire des migrants arrivant aux frontières de l’UE, en les enregistrant dans une base de données commune, Eurodac. Une «procédure à la frontière» est prévue pour ceux qui sont statistiquement les moins susceptibles d’obtenir l’asile. Ceux-là seront retenus dans des centres le temps que leur dossier soit examiné de façon accélérée, dans le but de renvoyer les déboutés plus rapidement.
Pour faire avaler la pilule à la Pologne et la Hongrie, qui ne comptent pas participer à la solidarité européenne pour accueillir des demandeurs d’asile, les pays pourront désormais «s’acheter leur droit à l’inhumanité», critique déi lénk, précisant que le prix par migrant que prévoit ce nouveau pacte de la honte est de 20 000 euros».
Dans une tribune publiée récemment dans Der Spiegel, l’ancien chef de la diplomatie Jean Asselborn mettait en garde contre le risque de voir le Parti populaire européen (PPE) glisser vers la droite pour se débarrasser de partenaires comme les sociaux-démocrates, les Verts ou les libéraux. Le PPE, dans un manifeste, entendait mener à l’avenir les procédures d’asile dans des pays tiers dits «sûrs», une pratique plus connue sous le nom de modèle rwandais que tentent d’exploiter les Britanniques. Les réfugiés seraient transportés par avion au Rwanda, où leurs demandes d’asile seraient traitées.
«D’immenses prisons seront construites aux frontières extérieures de l’UE, où les personnes en fuite s’entasseront par milliers dans des conditions déplorables. Les ONG alertent déjà», prévient déi Lenk. Si la réaction de Léon Gloden, ministre des Affaires intérieures, ne les a pas surpris outre mesure, lui qui applaudit «une gestion responsable des migrations», le parti lui fait savoir qu’elle n’annonce rien d’autre «qu’un nouveau désastre humanitaire aux frontières extérieures de l’UE».
Cafouillage au CSV
La question migratoire a donné lieu à des déclarations contradictoires parmi les représentants du Parti chrétien-social. Fin mars, le Premier ministre, Luc Frieden, avait déclaré, dans une interview accordée à nos confrères du Wort, qu’il n’était pas opposé à la proposition de traiter à l’avenir en dehors de l’Union européenne les procédures d’asile des personnes qui souhaitent entrer dans l’UE. La tête de liste du CSV aux européennes, Christophe Hansen, avait pourtant affirmé que le CSV ne voulait pas en entendre parler.
«Il est honteux que le Luxembourg soit associé à la solution rwandaise par ces déclarations du Premier ministre», avait réagi Franz Fayot. C’est pourtant celle qui se dessine doucement. Pour déi Lénk, l’UE a besoin «de toute urgence» d’un changement de cap. Le parti, comme d’autres en Europe, s’oppose à cette politique «inhumaine» et exige que «la soi-disant forteresse Europe soit définitivement démantelée», pour la défense du droit d’asile et du devoir humanitaire.
Le parti plaide pour un mécanisme de répartition solidaire et équitable entre les pays.
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