La langue, «premier vecteur d’intégration»
Paperjam 21 décembre 2022
L’Asti a publié un dictionnaire ukrainien-luxembourgeois-français, imprimé par le ministère de l’Éducation nationale. Une étape importante pour l’apprentissage de la langue comme vecteur d’intégration des réfugiés.
L’Association de soutien aux travailleurs immigrés (Asti) vient de sortir son dictionnaire ukrainien-luxembourgeois-français. Son directeur politique, Sérgio Ferreira, nous le présente.
Il est destiné aux réfugiés ukrainiens comme aux personnes les accueillant ou s’intéressant à leur langue. Entre le 1er mars et le 31 octobre 2022, 4.774 Ukrainiens ont introduit une demande de protection temporaire au Grand-Duché.
Quel travail a été effectué pour réaliser ces 260 pages?
Sérgio Ferreira. – «En 2016, nous avons édité un dictionnaire arabe, quand nous avions beaucoup de réfugiés de Syrie. Ont suivi l’édition farsi/dari pour les personnes venant d’Afghanistan et d’Iran, puis une version en tigrigna pour les Érythréens. Il nous a donc paru naturel d’aller vers cette voie quand la guerre a commencé en Ukraine.
La personne qui avait coordonné les premiers dictionnaires s’est mise à disposition, aidée par trois bénévoles ukrainiennes. L’une était là depuis quatre ans et parle luxembourgeois. Elles ont utilisé les vocables des éditions précédentes, en ajoutant des mots qui ont paru intéressants. Le ministère de l’Éducation nationale s’est chargé de la mise en page et de l’impression.
De 5.000 exemplaires. Combien cela a-t-il coûté?
«Je ne connais pas le chiffre. Nous avons vu, lors de sa visite à des classes de formation pour adultes, que ces dictionnaires sont très utiles et appréciés.
D’autres pourraient-ils être imprimés?
«Oui. Mais nous espérons que les choses vont se calmer.
À combien d’exemplaires aviez-vous imprimé les précédents?
«2.500 pour la version arabe, 1.500 pour les deux autres.
Pourquoi le français et le luxembourgeois, mais pas l’anglais?
«Au niveau international, il existe déjà pas mal de dictionnaires anglais. Nous avons choisi la langue nationale et celle de tous les jours.
Tout ce qui facilite la communication n’est pas une dépense mais un investissement.
Combien d’institutions ont-elles reçu des exemplaires?
«Environ 30. (Lycées accueillant des élèves ukrainiens, adultes apprenant le français, au Centre de primo-accueil, offices sociaux, associations en contact avec les réfugiés, ndlr)
Il est aussi possible de le demander au ministère de l’Éducation nationale (sfa@men.lu). Gratuitement?
«Oui. Il n’y a pas de conditions strictes. Dans un pays comme le Luxembourg, nous avons beaucoup de langues écrites et parlées tous les jours. Tout ce qui facilite la communication n’est pas une dépense mais un investissement.
La langue étant un vecteur d’intégration…
«Peut-être le premier et le plus important, au-delà du travail. Pour travailler, il faut parler les langues, c’est pour cela que leur apprentissage est fondamental.
Le dictionnaire compte 1.500 mots. A-t-il vocation à être étoffé?
«Ce n’est pas envisagé. Nous regardons, avec d’autres associations, la possibilité de travailler sur une version en braille.
Quelles sont les autres actions de l’Asti pour intégrer via la langue?
«Nous avons laissé tomber les cours, parce que cela coûte de l’argent et qu’il n’y a pas de financement public. Nous nous sommes donc recentrés sur des activités pratiques. Nous avons un pool de 300 personnes disponibles, en ligne ou par téléphone, pour des séances de dialogue deux à trois fois par semaine. Dans la majorité des cas, les gens finissent pas se rencontrer.
Avec le financement du ministère du Travail et du Fonds social européen, nous avons aussi lancé des cours de langues ciblés sur des métiers en pénurie.»
Le Service de la formation des adultes du ministère de l’Éducation nationale propose également des cours d’intégration linguistique aux demandeurs et bénéficiaires de protection nationale. Ils comptent 1.339 participants adultes, la majorité de Syrie (447), d’Ukraine (306), d’Érythrée (253) et d’Afghanistan (81), ndlr.