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Le voeu pieux du vivre ensemble

Loi sur le «vivre-ensemble» : jusqu’où porte la voix des étrangers ?

Mario Lobo, Maurice Bauer, Paul Delaunois, et Claire Geier ont échangé avec la ministre sur l’intégration des étrangers.

Alors que beaucoup d’attentes entourent la nouvelle loi sur le «vivre-ensemble interculturel» qui devrait être votée avant l’été, c’est la question ultrasensible du «décider ensemble» qui revient dans le débat.

La nouvelle loi sur le «vivre-ensemble interculturel» et ses structures au niveau communal et national permettront-elles aux étrangers qui peuplent le pays pour moitié de prendre davantage part à la société ? Certains en doutent sérieusement.

Lors d’une table ronde organisée par l’ASBL PiiLux la semaine dernière à Luxembourg, une petite cinquantaine de personnes, pour la plupart engagées au niveau politique ou associatif, ont fait part de leurs craintes à la ministre de la Famille et de l’Intégration, Corinne Cahen, porteuse du projet de loi, qui a eu bien du mal à convaincre.

Il faut dire qu’au Grand-Duché, la question de l’intégration est à la fois brûlante et cruciale, avec 50 % des habitants qui n’ont pas la nationalité luxembourgeoise – jusqu’à 72 % dans la capitale – près de 170 nationalités qui cohabitent, et 224 000 travailleurs frontaliers qui convergent quotidiennement vers les pôles d’attractivité du pays.

La ministre a déroulé son projet de loi face à des citoyens plutôt sceptiques.

Une foule à laquelle s’ajoutent encore 25 000 nouveaux arrivants chaque année, soit l’équivalent d’un cinquième de la population totale à absorber rien que le temps d’une législature. Sacré défi pour la cohésion sociale. Le public venu assister au débat ne le nie pas, mais pointe du doigt les dysfonctionnements de la loi précédente, alors que le choc du «non» massif (78 %) au droit de vote des étrangers en 2015 est encore dans toutes les têtes, et que la nouvelle Constitution distingue les Luxembourgeois des autres citoyens. Voilà pour le contexte.

Ce projet de réforme est censé, comme il l’annonce dès les premières lignes, «permettre à chaque personne qui réside ou travaille au Luxembourg de vivre, de travailler et de décider ensemble». Or, à en croire l’assemblée, ce dernier volet relève du vœu pieu, et ils n’attendent pas grand-chose de la nouvelle loi.

Les commissions consultatives d’intégration dans les communes cèderont bientôt leur place à des «commissions du vivre-ensemble interculturel» qui auront notamment pour mission de coordonner la participation citoyenne. «C’est la clé de cette loi, avec l’accès à l’information en plusieurs langues», martèle d’abord la ministre.

Elle vante une panoplie d’instruments, dont un «pacte du vivre-ensemble interculturel» à conclure avec les citoyens, luxembourgeois ou non, demandeurs ou bénéficiaires de protection internationale, mais aussi les frontaliers – une première – motivés pour organiser des activités en commun. «On veut que tout le monde participe, peu importe son statut ou sa nationalité, et ce dans tout le pays», déroule-t-elle, citant des exemples de ce qui pourra figurer au catalogue proposé, entre visites de la Bibliothèque nationale et ateliers interactifs sur MyGuichet.lu.

Plus on se rapproche du pouvoir, plus les barrières remontent

Quant à la déclinaison communale de ce pacte, destinée à soutenir les services locaux avec plus de moyens humains, elle a déjà séduit 33 communes, se félicite Corinne Cahen, avant que le public tempère son enthousiasme, lui rappelant que les commissions consultatives actuelles, pourtant obligatoires, ne fonctionnent en fait que dans certaines communes – une trentaine sur 102 dénonce l’ex-membre du Conseil national pour étrangers (CNE), Mario Lobo – et qu’elles peinent à mobiliser les citoyens (lire notre édition du 4 avril). 

Sans compter que les commissions «nouvelle version» ne seront plus imposées par règlement grand-ducal, pointe Claire Geier, vice-présidente de l’ASTI et elle aussi membre du CNE. «Un règlement d’ordre intérieur, c’est bien, à condition qu’il soit appliqué», fait-elle ainsi remarquer.

Sur le futur Conseil supérieur du vivre-ensemble interculturel, qui remplacera l’actuel comité interministériel à l’intégration et le CNE, elle salue une clarification des missions, tout en souhaitant le voir devenir obsolète : «Donnons le droit de vote aux étrangers au niveau national et nous n’aurons plus besoin du CNE», argue-t-elle, pour couper court aux critiques sur son mauvais fonctionnement.

Des reproches fondés : elle reconnaît que le manque d’implication freine les décisions – sur les 60 membres qui y siègent, la dernière réunion n’en a réuni que 14 – et que l’exclusion des personnes ayant la nationalité luxembourgeoise pose question pour les étrangers qui, comme elle, acquièrent la nationalité luxembourgeoise en cours de route. Une barrière qui sera levée avec la nouvelle loi.

Enfin, le modèle tripartite, qui a grippé les rouages du CNE par le passé, ne sera pas reconduit au sein du nouveau Conseil supérieur : «On veut que la représentation nationale du vivre-ensemble soit composée d’acteurs déjà engagés dans leur commune, au sein des commissions», explique Corinne Cahen, ajoutant que les électeurs de cette nouvelle instance seront les membres des commissions communales du vivre-ensemble de tout le pays.

L’obstacle de la langue à nouveau sur la table

De quoi irriter Mario Lobo, ancien vice-président du CNE, qui estime que rien ne garantit que la voix des étrangers sera bien représentée au Conseil supérieur : «Les associations d’étrangers sont écartées. Cette conception néolibérale de la société civile, basée sur les individus, me dérange beaucoup, tout comme l’intégration, qui doit forcément se faire selon les règles des Luxembourgeois», attaque le militant. La ministre dément. Il poursuit : «Ce pacte du vivre-ensemble présente l’assimilation comme seul chemin. Tu veux t’intégrer ? Apprends la langue et prends la nationalité. Or, c’est un échec», condamne-t-il.

Il décrit des droits accordés aux étrangers sur le papier loin d’être évidents en réalité : «Plus on se rapproche du pouvoir, plus les barrières remontent», témoigne-t-il, et notamment celle des langues, selon lui. Comme d’autres participants, il ne comprend pas que n’importe quelle conférence bénéficie aujourd’hui d’une traduction simultanée, quand l’article 14 de la loi communale interdit toute interprétation des débats lors des conseils communaux.

Article que la ministre, interrogée sur le sujet, fait mine d’ignorer, tandis que l’échevin de la Ville de Luxembourg, Maurice Bauer, fait valoir qu’une de ses collègues s’exprime en français en conseil communal «sans que cela pose le moindre problème». Mais de là à lui permettre à elle de comprendre les discussions, il y a visiblement un pas que le Luxembourg n’est pas prêt à franchir. Un dialogue de sourds qui donne une idée du long chemin restant à parcourir.

«Décider ensemble, ça se passe ailleurs»

Les discussions internes sur la nouvelle loi se poursuivent à l’ASTI, qui rendra son avis officiel d’ici la fin du mois, mais pour Sérgio Ferreira, en charge des questions politiques au sein de l’association, il ne faut pas se méprendre : «Ce texte n’est pas censé régler la question de la présence des étrangers au Luxembourg. La loi sur l’immigration, qui encadre l’accès au travail, est beaucoup plus cruciale, tout comme la loi électorale pour ce qui concerne les droits politiques ou la représentation des étrangers. Décider ensemble, ça se passe ailleurs», rectifie le porte-parole.

Pour lui, cette loi doit avant tout poser les jalons pour permettre à toute personne vivant ou travaillant au Grand-Duché, peu importe son statut, de s’impliquer dans la vie sociale et de trouver du soutien pour suivre des cours ou participer à des activités. Et c’est bien le cas, estime-t-il. Pour le reste, l’ASTI regrette que la transversalité de ces questions au niveau de toutes les politiques publiques n’y soit pas explicitement mentionnée.

Quant aux futures «commissions communales du vivre-ensemble interculturel», Sérgio Ferreira voit là un compromis, en attendant leur suppression au profit d’une composition plus représentative de la population dans l’ensemble des autres commissions, revendiquée de longue date par l’association. «Un idéal encore loin de la réalité», concède-t-il. Lire la suite

on reparle du droit de vote “national”

Au moment où est célébrée la nouvelle constitution qui proclame ( nous sommes en 2023 !) que « les Luxembourgeois sont égaux devant la loi » au moins deux voix qui voient plus loin:

Fernand Etgen, président de la Cambre des Déoputés lors des commémorations à Ettelbruck

selon le Wort du 2 mai 2023 : Chamberpräsident Fernand Etgen zog in seiner Rede Parallelen zwischen 1848 und heute und warf dabei auch die unangenehme Frage auf, wie repräsentativ für das Land das Parlament heute überhaupt noch sei. Viele Nicht-Luxemburger, die aber zum Wohlstand des Landes beitragen, in Luxemburg ihre Steuern zahlen und ihre Kinder zur Schule schicken, sind vom Wahlrecht ausgeschlossen. Etgen erntete für seine Bemerkung Applaus, statt aber die Frage noch etwas zu vertiefen, verwies er nur auf die neuen Formen der Mitbestimmung, die in der neuen Verfassung, die im Juli dieses Jahres in Kraft treten wird, vorgesehen sind.

Patrick Dury , président du LCGB le 1er mai (selon le Quotidien du 2 mai 2023 :(..)  La cohésion sociale ne pourra, selon le LCGB, être maintenue que notamment par un accès pour tous au monde numérique ou encore le droit de vote ou le vote obligatoire pour tous les habitants du Luxembourg. «Une démocratie ne peut se satisfaire d’une situation où seule une minorité déciderait de la composition de notre Chambre des députés.»

pour le Wort du 2 mai : Wahlrecht für alle

Weitere Forderungen des LCGB-Präsidenten waren das Wahlrecht für alle in Luxemburg ansässigen erwachsenen Bürger, ein besserer Zugang zur digitalen Welt für alle Arbeitnehmer, eine bessere Bildung und ein besseres Zusammenspiel zwischen Luxemburgern und Ausländern, „um die soziale Kohäsion und den sozialen Frieden im Land zu festigen“.

Dixième édition GRESIL

Dixième édition du Groupe d’échange et de soutien en matière d’intégration au niveau local – GRESIL

Le mercredi 26 avril 2023 s’est tenue une nouvelle édition du Groupe d’’échange et de soutien en matière d’intégration au niveau local (GRESIL) au Centre culturel à Colmar-Berg ainsi qu’en ligne via live-streaming.

Des responsables politiques, des représentants et agents communaux ainsi que des membres de commissions consultatives communales d’intégration se sont réunis en présentiel ainsi qu’en visioconférence pour échanger autour du thème « Noper sinn – Noper ginn : Renforcer le vivre-ensemble interculturel au niveau local – Dynamiser activement le bon voisinage ».

Au total, 110 participants ont assisté à l’événement représentant environ 50 communes. S’y ajoutent les conseillers à l’intégration ainsi que des représentants des différents ministères, du CNE et d’un certain nombre d’associations travaillant en faveur de l’intégration et du vivre-ensemble interculturel.

 

Élus de la diversité : leurs difficultés pour s’imposer en politique

La langue est citée comme la principale barrière à la participation en politique. (Illustration: adobe stock)

Luxembourgeois d’origine étrangère, Luxembourgeois racisés, étrangers devenus luxembourgeois : pas simple pour ces élus communaux au parcours singulier de s’imposer en politique, malgré les beaux discours sur la diversité.

Alors que leur mandat s’achève, cinq élus partagent les obstacles auxquels ils ont été confrontés. Loin de se décourager, tous sont prêts à rempiler.

José Vaz Do Rio
«Je me sentais légitime, mais j’ai dû renoncer»

Premier échevin à Bettendorf depuis six ans, il se présente à nouveau. (Photo: Alain Rischard)

La langue, c’est ce qui a empêché José Vaz do Rio, arrivé en tête des élections communales de Bettendorf en 2017, de s’asseoir dans le fauteuil de bourgmestre.

Originaire du Portugal et engagé de longue date au service de ses concitoyens, il a décliné le poste au lendemain du scrutin : «Je me sentais légitime, après six ans en tant que conseiller communal et avec le soutien des électeurs, mais j’ai dû renoncer. La loi est claire : les réunions du conseil doivent se tenir en luxembourgeois, et mon niveau n’est pas suffisant», reconnaît-il.

Aucune amertume cependant pour ce retraité de l’usine Goodyear de Colmar-Berg, car il estime que «diriger une commune est avant tout un travail d’équipe». C’est donc en tant qu’échevin qu’il a mené ces six ans de mandat, ce qui occupe une grande partie de son temps – au grand dam de son épouse.

L’envie de se rendre utile

Cette année, il se lance à nouveau dans la course, à 66 ans et sans étiquette, même s’il se sent proche des idées du DP. Au Luxembourg depuis 35 ans, José Vaz do Rio n’a jamais été confronté à la xénophobie, au contraire : «Les gens ont toujours été formidables, en m’acceptant à bras ouverts», assure cet habitant de Gilsdorf, désormais titulaire de la double nationalité.

Il s’est toujours senti redevable, guidé par l’envie de se rendre utile : «C’est comme ça que je suis heureux», sourit-il. Alors, forcément, le manque d’intérêt des étrangers pour les élections le désole : «Voter ne les intéresse pas, ils me le disent. C’est triste. Ils pensent que ça ne changerait pas grand-chose, mais c’est faux», explique-t-il.

Sa grande fierté, le jumelage de Bettendorf avec sa ville natale au Portugal en 2019 et les nombreux échanges interculturels qui en découlent.

Jana Degrott
«J’ai eu le sentiment de ne pas être à ma place»

Conseillère DP à Steinsel, elle briguera aussi un siège de députée en octobre. (Photo : Philippe Reuter)

Propulsée au conseil communal de Steinsel à tout juste 21 ans, Jana Degrott a pris ses distances avec la vie publique, le temps de digérer ces six années où elle a été beaucoup exposée.

«Je n’en fais pas un secret, je traverse une dépression liée à mon engagement politique», confie cette activiste à plein temps qui boucle actuellement ses études de droit.

«Ces derniers mois, j’ai ressenti une forte anxiété en allant au conseil. J’ai eu le sentiment de ne pas être à ma place.» La conséquence directe de microagressions répétées et d’attaques racistes à chacune de ses apparitions dans les médias.

«Je reçois systématiquement des menaces de mort, ou alors on me dit de retourner dans mon pays… Ça fait mal», soupire la jeune femme, rappelant au passage qu’elle n’a rien d’une étrangère, puisque son père est luxembourgeois et qu’elle a grandi ici.

Pas de quoi décourager cette battante, auréolée l’an passé du titre de «Leader» par le président Obama et déterminée à ouvrir l’espace politique : «Il y a beaucoup d’opportunités pour les personnes de couleur, car nous sommes sous-représentées. Or, il est crucial que chacun puisse apporter sa voix lors des décisions.»

Elle ne laissera plus rien passer

Elle regrette aussi un certain manque de renouveau dans les partis, où on peut croiser des dynasties de politiciens – «un grand problème dans la politique luxembourgeoise», estime-t-elle – pointant une fuite des talents.

«Beaucoup de gens brillants préfèrent s’investir dans le secteur privé, la politique ne fait pas partie de leurs plans. Ils sont convaincus que ce n’est pas leur place, parce qu’aucun de leurs proches n’évolue dans ce milieu», analyse Jana Degrott.

Aujourd’hui, elle dit se sentir mieux armée face aux critiques et ne remet pas en cause ses projets : décrocher un nouveau mandat local et entrer à la Chambre des députés en octobre.

«J’ai trop fait l’erreur de normaliser des choses qui ne sont pas tolérables : je ne laisserai plus rien passer», prévient-elle, soulignant que «la plupart des gens ont un grand cœur, c’est juste qu’on les entend moins».

Victoria El Khoury
«Le Luxembourg doit savoir ce qu’il veut»

Conseillère LSAP à Strassen, elle débarque à Junglinster. (Photo : Alain Rischard)

Son nom était évoqué pour le poste de bourgmestre à Strassen, sa ville d’adoption depuis 15 ans, mais cette conseillère communale socialiste de 45 ans a eu besoin de «renouveau» : il y a six mois, elle a fait ses valises direction Junglinster, avec l’envie de poursuivre son engagement politique.

Un sacré challenge puisque, dans sa nouvelle commune, elle est encore peu connue, et le LSAP fait partie de l’opposition. «Je veux être élue, oui, mais je m’investirai pour les habitants quoi qu’il arrive, parce que ça fait partie de moi», confie celle qui a grandi au Liban pendant la guerre et en a gardé un profond sens de la solidarité et de l’entraide.

Dès son arrivée au Luxembourg en 2007, cette chercheuse en biologie cellulaire et moléculaire au Luxembourg Institute of Health a intégré de nombreuses associations «pour rencontrer des gens», animant aussi des cours de cuisine, si bien que son visage est vite devenu familier.

«On n’est pas sur un pied d’égalité»

Le bourgmestre la convainc de se présenter aux élections en 2017 et elle débarque au conseil communal grâce à un score impressionnant. «Je me suis dit que j’allais assumer cette responsabilité, même si je ne parlais pas le luxembourgeois», raconte-t-elle, mettant le doigt sur le sujet sensible de la langue.

«C’est très frustrant, car on n’est pas sur un pied d’égalité. On peut même parler de discrimination linguistique : la loi communale stipule que le conseil doit se tenir en luxembourgeois et que nul ne saurait demander une traduction, alors que ça se fait dans n’importe quel autre événement aujourd’hui», souligne Victoria El Khoury, qui y voit un véritable paradoxe.

«Alors qu’on demande aux 50 % d’étrangers qui peuplent ce pays de s’investir en politique, ceux qui sont élus doivent laisser leur place?», interroge-t-elle. «Le Luxembourg doit savoir ce qu’il veut.»

Si elle n’a pas subi d’attaques, elle rapporte tout de même quelques piques : «Il est arrivé qu’on me réponde en luxembourgeois pour s’assurer que je ne puisse pas répliquer», regrette l’élue, qui dit consacrer beaucoup de temps à préparer les dossiers.

«Ça ne m’a pas découragée, même si ça a été dur parfois», reconnaît-elle.

Eduarda Macedo
«Il y a toujours ce plafond de verre»

Conseillère déi gréng à Luxembourg depuis 2021, elle se sent mieux armée pour cette campagne. (Photo : Hervé Montaigu)

À 63 ans, cette jeune retraitée des institutions européennes vient de passer un an et demi au conseil communal de la ville de Luxembourg, dans le fauteuil laissé vacant par Carlo Back.

Une nouvelle casquette qu’elle a enfilée non sans appréhension : «Je ne parlais pas luxembourgeois quand j’ai pris mon mandat. Aujourd’hui, j’ai un meilleur niveau, car j’ai pris des cours particuliers, mais je m’exprime toujours en français», confie-t-elle.

Ce qui a fait grincer des dents certains collègues, dès ses premiers pas : «Mon discours d’assermentation était en français et ça a choqué. La bourgmestre a dû rappeler que j’en avais parfaitement le droit», raconte celle qui a choisi de mettre son énergie ailleurs que dans l’apprentissage intensif de la langue. «Je m’investis plutôt dans la connaissance des dossiers et le contact avec ma communauté.»

En s’engageant en politique, elle tenait à montrer aux étrangers que c’est possible, mais dit aujourd’hui comprendre ceux qui font marche arrière : «Moi j’ai du soutien, des collègues qui assument avoir pris ce risque. Je ne dépends pas de la politique, j’ai aussi les moyens de payer un professeur de luxembourgeois. Et ça ne me gêne pas de passer parfois pour une idiote», sourit-elle.

Car il y a des fois où elle ne comprend pas tout et répond à côté. Ou des conversations en groupe sur mobile qui vont bien trop vite pour elle, avec leur lot d’abréviations. «Il faut oser dire qu’on n’a pas compris et c’est embarrassant.»

«La peur de la perte d’identité est très forte»

Pour elle aussi, la langue constitue le principal obstacle à sa participation à la vie politique. «Cette loi qui interdit toute traduction, il faut y réfléchir sérieusement», lance cette traductrice-interprète de formation.

«Le multilinguisme est pratiqué partout dans le pays, mais il y a toujours ce plafond de verre entre la vie quotidienne et le pouvoir politique, où se prennent toutes les décisions.»

Selon Eduarda Macedo, c’est donc le cadre législatif qui est à revoir, pour rendre accessibles à tous les discussions au niveau politique. Un pas que le Luxembourg n’est pas prêt à franchir : «La peur de la perte d’identité est très forte. Mais les deux ne sont pas incompatibles. C’est même tout le contraire», estime-t-elle.

Natalie Silva
«D’autres ont ouvert la voie avant moi»

Bourgmestre sortante de Larochette, elle veut se concentrer sur sa commune et renonce aux législatives. (Photo : dr)

À chaque nouvelle rencontre, ça ne loupe pas : on lui parle en français. Cette native d’Ettelbruck se fait alors un plaisir de répondre dans un luxembourgeois parfait.

À 42 ans, la bourgmestre de Larochette ne s’étonne plus qu’on la prenne encore pour une étrangère, elle s’en amuse. Première femme aux racines cap-verdiennes à accéder à ce poste, son engagement politique lui a toujours paru «naturel» : «C’était une évidence pour moi de rendre à la communauté un peu de ce qu’elle m’a donné», confie cette mère d’un ado de 16 ans.

Souvent qualifiée de modèle, Natalie Silva n’a pourtant pas l’impression d’avoir fait quelque chose d’exceptionnel : «J’ai toujours considéré que la politique m’était ouverte. D’autres Luxembourgeois d’origine étrangère ont montré la voie avant moi», souligne-t-elle, citant l’ancien ministre de la Justice Félix Braz.

«On a refusé de me serrer la main»

À un détail près : sa couleur de peau, qui fait d’elle une cible permanente. «Oui, du racisme au Luxembourg, il y en a, et il y en a toujours eu. Je ne suis pas épargnée. Certaines personnes ont été jusqu’à refuser de me serrer la main lorsque j’étais échevine. Mais si je m’arrête à ça, je ne fais plus rien», tranche-t-elle, avant d’ajouter qu’elle ne retient que le positif.

Comme le jour où une citoyenne sceptique s’était ravisée, et l’avait félicitée pour son bon travail. Le manque de diversité en politique, elle le regrette, et pointe le multilinguisme qui ne facilite pas les choses : «À la commune comme à la Chambre, tous les débats se déroulent en luxembourgeois, tandis que l’administratif est en français. Il faut donc maîtriser au moins ces deux langues», note-t-elle.

Il faut savoir composer : «Notre équipe communale compte un Belge qui comprend assez le luxembourgeois pour suivre, mais passe au français dès qu’il doit exprimer son opinion. C’est le compromis qu’on a trouvé», explique-t-elle.

Elle y voit une forme d’«incohérence» du système politique, qui devrait pouvoir inclure les étrangers. Natalie Silva sera à nouveau candidate le 11 juin prochain, mais renonce à briguer un mandat de député.

La Chambre visite le bâtiment T

Le 23 mars une délégation de la Chambre des Députés et le Ministrte de l’Immigration ont visité le bâtiment “T” au Kirchberg , bâtiment qui abrite près de 900 demandeurs de protection, en majorité des Ukrainiens, mais aussi des demandeurs de protection internationale venant d’ailleurs.

Selon la présentation dans l02-2023 ils se seraient informés de la collaboration entre Caritas, Croix Rouge et ONA.

 Me trouvant sur place  en tant que voisin du bâtiment, mais non autorisé à participer à la réunion, je puis cependant affirmer que ni Caritas ni Croix Rouge n’ont participé à cet échange. (sk)

Accueil de réfugiés : le Luxembourg a-t-il « atteint ses limites » ?

Accueil de réfugiés : le Luxembourg a-t-il « atteint ses limites » ?

Le taux d’occupation actuel des foyers d’accueil avoisine les 95%. (Photo archives Isabella Finzi)

Une vague inédite de personnes cherchant refuge au Luxembourg a déferlé en 2022 sur le territoire. Mais le pays dispose-t-il de suffisamment de places d’accueil pour les accueillir ? Le ministre de l’Immigration, Jean Asselborn, a livré quelques chiffres ce lundi matin.

2022 fait figure «d’année hors du commun» pour l’accueil de réfugiés au Luxembourg, avec un chiffre en hausse de près de 82% par rapport à l’année précédente. « Nous sommes de retour au niveau de la grande crise migratoire de 2015 », notait déjà, le 22 février dernier, le ministre de l’Immigration, Jean Asselborn, au moment de livrer son bilan.

Deux mois plus tard, les députés de l’opposition (CSV), Paul Galles, Claude Wiseler et Marc Spautz, ont demandé davantage de détails sur la répartition des réfugiés dans les différentes communes du pays, s’inquiétant que le Luxembourg n’est « atteint ses limites ».

Actuellement, le Grand-Duché compte plus de 6 047 réfugiés sur tout son territoire, répartis dans 33 communes : sans surprise, la capitale demeure la ville où ils résident majoritairement. Luxembourg compte ainsi 443 bénéficiaires de protection internationale et 667 bénéficiaires de protection temporaire. Arrivent ensuite Sanem, avec 236 bénéficiaires de protection internationale, et Diekrich (190 réfugiés). Differdange (177) et Kärjeng (135) viennent compléter le classement.

Au niveau des « demandeurs de protection internationale », donc toujours dans l’attente d’une réponse, c’est, là aussi, à Luxembourg-Ville que l’on retrouve le plus de personnes, selon les chiffres fournis ce lundi matin par le ministère de l’Immigration : 985 demandeurs sont en attente de régulation dans la capitale, 246 à Mersch et 161 à Berdorf. La majorité des dossiers correspondent à des ressortissants syriens, érythréens et afghans.

Les foyers quasi saturés

L’Office national de l’accueil (ONA) a enregistré, en 2022, une augmentation record de 238,8 % des nouvelles arrivées dans son réseau de 67 structures d’hébergement. Au total, 7 729 personnes ont cherché à trouver refuge dans un des foyers, soit en moyenne 604,2 arrivées par mois (contre 177,8 en 2021). Fin février, le taux d’occupation des structures d’accueil était de 93,7% : il a encore augmenté depuis.

En effet, selon les chiffres transmis par le ministère de l’Immigration, le taux d’occupation des structures de l’ONA avoisinait, fin mars 2023, les 95%.

Sur les 2 846 lits disponibles à Luxembourg-Ville, 1 110 étaient occupés par des bénéficiaires de protection internationale et temporaire. Plus de la moitié des lits disponibles à Sanem étaient également occupés (236 sur 420), même chose pour Diekirch (190 lits occupés sur les 346 mis à disposition).

Les Syriens arrivent en tête des personnes hébergées, suivis des Ukrainiens et Érythréens.

Conférence : le projet de loi du vivre ensemble

La future loi sur le vivre ensemble interculturel. Vers un nouveau modèle d’accueil et intégration au Luxembourg ?

Jeudi 27 avril 2023 à 19.00
Centre Culturel Gare, au 2e étage
(29, rue de Strasbourg, Luxembourg Ville)

Nous profiterons de l’expérience et de l’expertise de :

  • Corinne CAHEN
    Ministre de la Famille, l’intégration et la Grande Région
  • Maurice BAUER
  • Mario LOBO
    Ancien Vice-président du Conseil National pour étrangers.
  • Sérgio FERREIRA
    Directeur Politique de l’ASTI (Association de Soutien aux Travailleurs Immigrés)La modération et les questions seront assurées par Paul DELAUNOIS (membre de PiiLux).

L’invitation

Élections communales : « Ech kann nëmmen de Kapp rëselen »

L’inscription des personnes étrangères sur les listes électorales pour les communales patine, alors que la date butoir est fixée au 17 avril à 17 heures. Pour l’Asti, en première ligne sur ce front, cette situation résulte d’abord d’un manque de volonté politique
C’est un post Facebook : son auteur raconte qu’il voulait « apporter » au chef d’un restaurant un moulin à poivre qu’il avait lui-même sculpté dans le bois. Mais le chef, dont il ne précise pas la nationalité, n’en a pas voulu. Et voilà notre sculpteur dépité et remonté : « Dommage que les non-Luxembourgeois n’aient aucun sentiment pour notre culture. Ech kann nëmmen de Kapp rëselen », conclut-il hâtivement. Il n’y a là rien de surprenant sur ce réseau social, réceptacle de toutes les aigreurs et pensées à courte vue. Si ce n’est que le post a été relayé sur son compte Facebook par Viviane Reding, personnalité politique chrétienne-sociale de premier plan et ancienne vice-présidente de la Commission européenne.

Ce procès d’intention contre les « non-Luxembourgeois-es » qui ne voudraient pas s’intégrer dans leur pays d’accueil devient aussi une explication commode face au faible taux de personnes étrangères inscrites sur les listes électorales pour les communales du 11 juin prochain : elles n’étaient que 16,1 %, fin mars, à avoir franchi le pas. L’argument est dilué et se lit entre les lignes chez nombre de commentateurs-trices politiques et médiatiques, qui y décèlent une absence de volonté de s’impliquer dans la vie démocratique locale.

Alors même que le gouvernement se décarcasse. Il a d’abord supprimé, en 2022, la condition de résidence de cinq ans pour s’inscrire sur les listes. Et il y a la campagne officielle « Je peux voter », destinée à informer et convaincre par des actions ponctuelles et divers supports de communication. Il en va jusqu’à la ministre de l’Intégration, Corinne Cahen, qui mouille le maillot : elle vient de visiter « 15 entreprises et institutions occupant un nombre important de résidents non luxembourgeois » pour expliquer le système électoral. Et comme par enchantement, les inscriptions ont bondi depuis début mars : plus de 9.139 personnes se sont nouvellement inscrites, se félicite le ministère. On ne peut qu’applaudir à tant de louables efforts.

Mais cette communication bien huilée est loin de convaincre Sergio Ferreira, directeur politique de l’Association de soutien aux travailleurs immigrés (Asti) : « Pourquoi les étrangers ne s’inscrivent-ils pas davantage ? Il y a sûrement un manque d’intérêt chez certains, mais le fait est qu’ils sont nombreux à ne même pas savoir qu’ils peuvent voter. On a rencontré des étrangers récemment naturalisés qui ne savent même pas que le vote est obligatoire pour les Luxembourgeois. » Soit un déficit d’information des autorités en direction de leurs administré-es. Sergio Ferreira regrette la faiblesse des campagnes d’affichage ou de diffusion de spots radio et télé encourageant au vote.

Trente ans de barrière

Pourtant, reconnaît-il, « nombre de communes ont fait de gros efforts ». Pour d’autres, c’est service minimum. Un lecteur nous signale ainsi que sur le site internet de la mairie d’Esch-sur-Alzette, il est toujours fait état de la condition de résidence de cinq ans. Pour beaucoup d’élus, le vote étranger portait longtemps le risque de perturber les équilibres politiques traditionnels. En réalité, les étrangers-ères votent peu ou prou comme les Luxembourgeois, montrent les précédentes élections. « Pour certains politiciens, c’est de la paresse, ils préfèrent s’adresser uniquement à leurs électeurs habituels, sans faire d’effort en direction des étrangers. Parfois, ça relève de la xénophobie », accuse Sergio Ferreira.

Alors que les 256.989 étrangers-ères de plus de 18 ans vivant au Luxembourg représentent plus de la moitié du corps électoral potentiel, leur participation à la vie politique est un enjeu démocratique. « Pendant plus de 30 ans, on a mis des barrières », explique le directeur politique de l’Asti, le grand-duché étant le seul pays de l’UE à avoir posé, jusqu’à l’an dernier, une condition de durée de résidence. « Ce droit de vote ne découle pas d’une loi luxembourgeoise, mais du traité de Maastricht », rappelle Sergio Ferreira. « Il dépasse le cadre local et national, il est synonyme de citoyenneté européenne. »

Ce qui pourrait être un rappel utile à Viviane Reding, autoproclamée chantre de l’Union européenne, mais qui relaie les préoccupations identitaires de possibles électeurs-trices. Un double jeu auquel on a juste envie de répondre : « Ech kann nëmmen de Kapp rëselen. »

Questions (et réponses?) sur les CCCI et le CNE

La députée Nathalie Oberweis (Déi Lénk) a posé des questions sur le fonctionnement des CCI et du CNE à la Ministre de la Famille.

La Ministre Corinne Cahen (DP) y a répondu.

Une remarque personnelle de serge kollwelter: Abolir les CCI parce qu’elles ne fonctionn(ai)ent pas, alors que le Ministère de tutelle n’a rien entrepris pour leur rappeler leurs obligations légales, à savoir au minimum 4 réunions par an, avis annuels obligatoires e.a. sur l’organisation scolaire et envoi des compte-rendu au Ministère .