Une nouvelle instance pour favoriser le vivre-ensemble au Luxembourg
Le Conseil supérieur du vivre-ensemble interculturel sera élu le 12 juin prochain par plus de 1.000 frontaliers et résidents luxembourgeois.
Virgule, 22 avril 2024
Exit le Conseil national pour étrangers, bonjour le Conseil supérieur du vivre-ensemble interculturel. Au sein de cette nouvelle instance pourront siéger des résidents luxembourgeois comme des frontaliers, si tant est que ces derniers aient rejoint les commissions consultatives communales d’intégration (CCCI)
Les CCCI ce sont des groupes de travail constitués à l’échelle d’une commune. Pour y participer, il est nécessaire d’habiter le territoire de la commune, ou d’y travailler. Et les 100 communes que compte le Luxembourg avaient jusqu’au 31 mars dernier pour faire parvenir les listes des membres qui constituent ces commissions. «Ces membres formeront le corps électoral du Conseil supérieur du vivre-ensemble. Il y aura entre 1.000 et 1.200 votants», explique Anne Daems, responsable de la division Vivre-ensemble du ministère de la Famille et de l’Intégration.
En actant la création du Conseil supérieur du vivre-ensemble interculturel, la loi relative au vivre-ensemble a donc fait disparaître une autre instance, le Conseil national pour étrangers. Selon Anne Daems, ce conseil «ne reflétait plus l’esprit de la nouvelle loi». Permettant une représentation des différentes nationalités présentes au Luxembourg, l’instance excluait de facto les personnes acquérant la nationalité luxembourgeoise. «Le nouveau conseil ne représente plus seulement les étrangers, mais toutes les personnes engagées pour le vivre-ensemble au Luxembourg, peu importe leur statut, qu’elles soient frontalières ou résidentes.»
30 membres élus
Pour constituer leurs commissions, les communes étaient libres de s’organiser comme elles le désiraient. «Beaucoup de communes nous ont d’ailleurs appelé, car elles ont reçu trop de candidatures, et nous leur avons donné des conseils pour gérer cette situation», poursuit Anne Daems.
Le Conseil supérieur, lui, en comptera 30, dont 14 qui seront nommés par le ministre de la Famille, des Solidarités et du Vivre-ensemble. «Six membres représenteront l’Etat, six membres seront issus des associations et deux membres siègeront pour le Syvicol», détaille Anne Daems. Les 16 autres membres devront se faire élire par les membres des commissions communales, le 12 juin prochain.
Parmi eux, on retrouvera peut-être Georges Gondon. Ancien membre du Conseil national pour étrangers, le frontalier belge est membre de la commission de la commune de Steinfort. Pour autant, celui qui travaille depuis de nombreuses années au Luxembourg ne voit pas forcément d’un bon œil «cette autre manière d’envisager l’intégration».
Quelle place pour les frontaliers?
Au centre de ses griefs, le manque de communication autour de l’initiative. «Pour être membre de ces commissions, il fallait en faire la demande, et pour en faire la demande, il fallait être au courant. Or, il n’y a pas grand monde qui était au courant», souligne Georges Gondon.
Pour les toucher, les communes devaient se reposer sur les entreprises. «Nous avions envoyé des kits, avec des affiches aux entreprises et aux chambres professionnelles», indique Anne Daems, consciente que la communication n’était pas forcément idéale. «Nous allons essayer de travailler là-dessus ces prochaines années.
De son côté, Georges Gondon s’interroge sur le nombre de frontaliers qui siègera effectivement dans ces commissions. «S’il n’y a pas de frontaliers dans le conseil, on aura raté quelque chose», estime-t-il. Anne Daems, elle, est plus nuancée: «Un conseil sans frontaliers ne serait pas un échec, mais plutôt un signal qu’on a encore du pain sur la planche».
Un rôle consultatif
Pour le moment, le ministère n’est pas en mesure de révéler combien de frontaliers font partie des commissions communales. Pour être élus, les membres des commissions devront candidater en binôme, composé d’un titulaire et d’un suppléant, avant le mois de juin. Cinq jours avant l’élection, le corps électoral sera convoqué et recevra un code PIN qui lui permettra de donner jusqu’à une voix par binôme sur une plateforme électronique qui sera accessible pendant 24h.
Le conseil devra ensuite se réunir une première fois avant les congés d’été, fixés à la mi-juillet. Mais quel sera exactement son rôle? «Le Conseil supérieur du vivre-ensemble interculturel a un certain nombre de missions, comme celle de donner son avis sur le vivre-ensemble, accompagner la mise en place des politiques qui concernent ce sujet au niveau national ou encore aider à lutter contre la discrimination», énumère Anne Daems.
Au regret de Georges Gondon, cette nouvelle instance ne permettra plus de traiter certains thèmes qui étaient défendus par le Conseil national pour étrangers. «Le CNE avait la capacité de proposer des avis sur les matières personnalisables, liées aux personnes, comme le télétravail des frontaliers ou les conséquences du Brexit. Où ces thèmes pourront-ils être abordés désormais?», questionne le frontalier belge.
Des ajustements prévus
«Tous les sujets qui concernent le vivre-ensemble seront traités. Il faudra cependant veiller à trouver le bon équilibre entre les différents sujets. Discuter des jours de télétravail et des impôts, ce ne sera plus notre boulot», tranche Anne Daems, qui estime que ces thématiques «pourront être abordées ailleurs».
Élus pour six ans, les membres des commissions communales et du conseil supérieur ont pour objectif d’améliorer le vivre-ensemble au Luxembourg. Mais avant que leur mandat n’arrive à échéance, le ministère entend bien évaluer le dispositif. «Nous allons faire un état des lieux à la fin de la mandature dans le but d’adapter notre communication en vue du renouvellement du Conseil. Il faut laisser du temps au temps, que tout se mette en place.»